La presse en parle
< Retour aux actualitésLe porc basque sauvé de l'oubli
Le Haut du panier - le porc basque
Sur les hauteurs de la commune de banca, dans la Vallée des Aldudes, rendez-vous avec Michel Oçafrain sur l'exploitation familiale. Une maison à flanc de montagne verdoyante, avec ses vastes pâturages pentus destinés au parcours de quelques vaches, de brebis et de cochons. Mais pas n'importe quel cochon ! Le véritable porc basque, dans toute se "splendeur", corps rose, tête et culs noirs, longues oreilles croisées sur le groin... Dans un environnement naturel, Michel Oçafrain les élève selon des principes opposés aux canons productivistes de l'agriculture intensive : il faut voir ces "bestiaux", débonnaires, baguenauder en liberté sur leur vaste espace de vie... Sans la volonté de quelques acharnés, cette image-là a bien failli être rangée au rayon des souvenirs.
Des survivants !
1981 : l'espèce est déclarée en voie de disparition ! A l'époque, il ne reste que 25 truies et 2 verrats en élevage en France... Autant dire que le porc basque, concurrencé alors par des races plus productives, est en passe de s'éteindre. Et puis, sous l'impulsion d'une poignée d'éleveurs dont Pierre Oteiza, la race retrouve peu à peu des effectifs conséquents et repeuple sa région d'origine. Sauvegarde d'un patrimoine ! Car le porc basque - ou encore pie noir du Pays basque ou euskal xerria dans la langue autochtone - est identifié comme l'une des six races locales porcines françaises avec le porc gascon, le porc corse, le porc limousin, le porc blanc de l'Ouest et le porc de Bayeux et l'une des plus anciennes d'Europe. Aujourd'hui, la petite dizaine d'éleveurs de la filière porc basque s'est élargie à une association regroupant plus de 70 adhérants, tous non seulement engagés dans la protection de ce fameux cochon mais aussi dans la valorisation d'un savoir-faire. Réunis sous la bannière Kintoa, ils ont remis un dossier complet dans les mains de l'Inao en vue de l'obtention d'une AOC sur la viande fraîche et le jambon. Leur argument principal : un cahier des charges très exigeant et qualitatif, déjà respecté à la lettre par tous les éleveurs. Pas question non plus de transiger sur les méthodes d'élevage et de transformation. Parmi les points essentiels : l'élevage exclusif et en liberté du porc de pure race basque, un abattage à 12 mois minimum, une limitation à 40 têtes par lot et par hectare, un vide sanitaire de quatre mois par an pour chaque parcelle afin qu'elle se régénère, une alimentation san OGM d'herbes, de châtaignes, de glands, de céréales et d'un peu de protéïnes... Et, pour les jambons, un poids minimum dont 10 à l'air libre, ou encore la présentation de chaque pièce à une commission d'agrément pour dégustation...
La reconnaissance d'une spécificité
Le but ? Que les produits estampillés Kintoa, et peut-être bientôt distingués par une AOC, démontrent des qualités uniques et propres à leur terroir, les superbes jambons par leur moelleux, leur arômes de sous-bois et de noisette leur longueur en bouche et leur fondant ; la viande fraîche par son rare persillé et sa tendreté.
Le coeur géographique du renouveau du porc basque bat dans la Vallée des Aldudes. C'est ici que Pierre Oteiza a installé son repaire notamment un immense séchoir qui accueille les jambons de 500 producteurs dont ceux des adhérents à Kintoa. C'est aussi là, juste à côté, que s'est implantée la coopérative Belaun en 2010. Créée par sept producteurs de cochon, veau et agneau, la structure abrite un laboratoire de transformation (naturelle, sans conservateurs !), un séchoir à saucissons, un magasin de vente de produits fermier, sans oublier une société de commercialisation qui travaille notamment avec Terroirs d'Avenir, petite entreprise, spécialisée dans la mise en valeur de produits artisanaux d'exeption ou encore avec Yves-Marie Le Bourdonnec, star des bouchers parisiens. Parmi les initiateurs de Belaun, Michel Oçafrain. Maire de son village et infatigable défenseur d'une agriculture durable, il est, comme son père avant lui, président de la Filière porc basque et à la pointe de tous les "combats" dans la reconnaissance du porc basque et de Kintoa. Chaque mois, il emmène trois à quatre cochons à l'abattoir, récupère les carcasses pour vendre ses jambons, fabriquer des saucissons mais aussi du pâté, du chichon de la saucisse confite, du jambonneau...
Le tout issu d'une matière première 100% terroir et autochtone : un "détail" d'importance à une époque où la charcuterie fabriquée au Pays basque ne provient pas uniquement de cochon race basque, loin de là. Comme la salaison corse, en l'absence de réglementation poussée, la viande peut dans le pire des cas être élaborée avec des cochons en provenance des pays de l'Est.